Grâce à une formation sur le monde de l’entreprise réalisée par microStart, Belgique en partenariat avec le consortium européen pour le projet PLOUTOS, Marceline Uwineza, ressortissante du Rwanda, aujourd’hui installée à Bruxelles, a pu gagner en confiance dans son projet d’entreprise et prendre un nouveau départ. Financé par le fonds européen pour l’Asile, la Migration et l’Intégration (AMIF) à travers sept pays européens, PLOUTOS, au stade pilote, a déjà facilité l’intégration de plus de 300 ressortissants étrangers hors Union Européenne.
Comme la majorité des 13 000 personnes d’origine rwandaise qui vivent aujourd’hui en Belgique suite au génocide de 1994, Marceline Uwineza, a dû quitter sa ville d’origine Kigali afin de fuir des perquisitions politiques et construire un meilleur avenir pour sa famille.
Cours d’éducation financière en Belgique, « la formation auprès de microStart m’a donné confiance et une visibilité dans mon projet», Marceline Uwineza.
« Il est important pour moi de vivre du fruit de mon travail et non de subventions sociales », indique avec force cette femme courageuse et déterminée de 41 ans en évoquant l’aide trouvée dès son arrivée en Belgique auprès du bureau d’intégration pour primo arrivants de la région bruxelloise.
« J’ai d’abord fait une équivalence en administration des entreprises pour pouvoir travailler dans mon domaine de compétences. Mais j’ai rencontré des difficultés linguistiques avec le néerlandais notamment, et j’ai rapidement compris qu’il me serait très compliqué de trouver un emploi dans mon domaine ».
Licenciée en administration des entreprises au Rwanda, elle a fait ses premiers pas d’entrepreneuse dans le domaine de la vente de pièces automobiles à Kigali avant d’occuper un poste d’agent bancaire. « J’ai beaucoup aimé le métier de commercial en pièces automobiles que j’ai pratiqué durant neuf années. Mais les ventes n’étaient plus suffisantes pour pouvoir en vivre », regrette Marceline avant d’ajouter : « Si je pouvais choisir, je monterais le même business en Belgique ».
Déterminée à s’en sortir, elle décide de se lancer en tant qu’indépendante après s’être renseignée sur les options de formations qui s’offraient à elles. Elle finit par choisir une formation de taxi chauffeur qu’elle réussit avec succès. En novembre 2022, elle fait la demande pour obtenir ses propres plaques d’immatriculation afin de pouvoir exercer et recherche en parallèle sur internet un financement auprès de l’institution de microfinance microStart.
« En mars 2023, microStart m’a parlé de la formation en éducation financière à laquelle je me suis inscrite. Afin de pouvoir présenter un projet de microfinancement, je dois d’abord avoir mes plaques, ma carte professionnelle et mon numéro de TVA. Une fois tous ces documents obtenus, je ferai une demande de microcrédit de l’ordre de 15 000 à 25 000 euros pour acheter une voiture électrique », indique-t-elle.
Marceline est la meilleure défenseure de ce type de formation puisqu’elle encourage vivement ses amies à se lancer à leur tour : « Ma vie d’aujourd’hui en Belgique est très différente de celle que j’ai quittée en Afrique. Même si ça n’est pas facile tous les jours, la Belgique m’a offert la chance de construire un projet de vie. Je me sens donc redevable et je dois apporter quelque chose à ma nouvelle patrie ».
Créée en 2011, microStart est aujourd'hui l'un des acteurs européens les plus dynamiques dans le monde de la microfinance en Belgique et a développé dans le cadre du partenariat avec PLOUTOS deux formations liées à l’entreprenariat (langage de l’entreprise et éducation financière) destinées aux personnes qui ont une connaissance limitée du français et proviennent de pays tiers. A ce jour, David Taquin, Directeur Développement chez microStart, indique avoir formé 60 personnes dans le cadre de cette association.
MicroStart possède une vaste expérience dans la fourniture de services de développement commercial destinés aux groupes vulnérables, y compris aux ressortissants de pays tiers, et était donc un partenaire naturel pour organiser les formations PLOUTOS. Chez microStart, ces services sont considérés comme faisant partie intégrante du soutien fourni avant, pendant et après l’obtention d’un microcrédit – et comme un facteur favorisant le succès des projets d’entreprise.
Faire plus pour l’entreprenariat
« Un bon nombre de participants que nous estimions loin de l’entreprenariat ou de l’emploi salarié se sont avérés très motivés. Il y a eu beaucoup d’échanges entre participants et cela a tiré le groupe vers le haut. Enormément de gens en formation ont demandé un coaching personnalisé pour les aider à monter un business plan et un plan financier. Un bon nombre d’entre eux ont également obtenu un financement pour lancer une activité. PLOUTOS répond donc bien à un besoin de terrain », indique David Taquin.
« Enormément de gens en formation ont demandé un coaching personnalisé pour les aider à monter un business plan et un plan financier. PLOUTOS répond donc bien à un besoin de terrain », David Taquin, Directeur Développement chez microStart
Grâce à la mise en œuvre de cours de langue des affaires et de culture financière en Grèce, Bulgarie, Italie, Suède, Croatie, Belgique et à Chypre, PLOUTOS entend aider les participants à prendre des décisions financières judicieuses pour lancer leur propre entreprise.
Propos confirmés par Marceline Uwineza qui se dit très satisfaite de sa première formation PLOUTOS: « La formation m’a beaucoup apporté. J’ai appris à présenter un business plan solide, à calculer mes dépenses, mes rentrées, connaître les différentes taxes à payer en Belgique en tant qu’entrepreneur, rédiger une déclaration de revenus et comment fonctionne la TVA », indique-t-elle, confortée dans son idée de se lancer en tant qu’indépendante après la formation. « Il faudrait juste faire plus de promotion via des canaux proches du public cible, tels que les centres pour primo arrivants par exemple », suggère-t-elle.
On retrouve la même assurance et le même enthousiasme chez d’autres participants dans d’autres pays, notamment chez Lazaro Moujon Fernández, un cubain qui vit à Athènes depuis 5 ans : « J'adore cuisiner et je souhaite ouvrir un restaurant cubain ici. J'avais besoin de me renseigner sur les lois grecques et sur la façon d'obtenir un prêt ou de trouver de l'argent pour démarrer mon entreprise. Les cours d'alphabétisation m'ont beaucoup aidé et ont eu un grand impact sur moi. Ils m'ont appris des choses importantes sur la gestion de l'argent, les fraudes possibles et les investissements intelligents. Maintenant, je me sens plus en confiance pour poursuivre ma passion, ouvrir mon propre restaurant cubain et apporter les délicieuses saveurs de Cuba à la Grèce.”
Les partenaires du projet pilote PLOUTOS
- Halmstad University (Suéde)
- Aristotle University of Thessaloniki (Gréce)
- Innovation Hive (Gréce)
- Future Needs (Chypre)
- ABI Lab (Italie)
- CESIE (Italie)
- Squaredev (Belgique)
- European Microfinance Network (Belgique)
- Centre for Peace, Nonviolence and Human Rights (Croatie)
- Sofia Development Association (Bulgarie)
- Breza Youth Association (Croatie)
Améliorer les perspectives de carrière des ressortissants hors UE
« Les 11 partenaires impliqués dans PLOUTOS sont partis du constat suivant : les ressortissants des pays tiers sont dans l’incapacité de lancer leur propre entreprise à leur arrivée sur le continent européen car ils ont un déficit en termes de langue et de compétences financières», indique Jorg Schoolmann du Réseau Européen de la Microfinance. Grâce à la mise en œuvre de services de développement commercial tels que les cours de langue des affaires et de culture financière dans les pays en première ligne des flux migratoires que sont la Grèce, Chypre, la Bulgarie, ou encore l’Italie ainsi que la Suède, la Croatie et la Belgique, PLOUTOS entend aider les participants à identifier les opportunités et risques du monde financier et prendre des décisions judicieuses pour lancer leur propre entreprise. « PLOUTOS nous a permis de comprendre ceci : il existe un parcours d’intégration pour ces personnes dans bon nombre de pays européens mais ce parcours se focalise surtout sur les droits sociaux. Il faut donc le compléter par un kit sur l’entreprenariat », ajoute, pour sa part, David Taquin.
Afin d’aider ce public à faire le pont entre les compétences acquises dans leur pays d’origine et leur arrivée dans un pays européen et ainsi faciliter leur intégration, le consortium a construit tout un package de formations et d’outils. Pour y participer, les ressortissants de pays tiers doivent vivre dans les pays pilotes depuis au moins trois ans et être âgés de 18 à 40 ans. Proposés sous forme physique et en ligne, les cours utilisent diverses méthodes d'enseignement et des conférences invitées pour garantir un apprentissage complet. Les deux programmes de formation ont été traduits en 7 langues. Au cours du processus de traduction, tous les partenaires ont adapté les deux programmes en fonction de leurs propres contextes nationaux, par ex. système bancaire national, lois nationales, terminologie nationale.
Au total, plus de 300 ressortissants hors UE ont participé aux deux cours, avec une moyenne de 15 séances en ligne ou en présentiel, 50 heures de cours en classe et 12 heures de devoirs. Plus de 30 nationalités extérieures à l'UE ont participé ayant différents profils : étudiants, demandeurs d'emploi, réfugiés et employés, et plus de 40 % étaient des femmes. "En tant que professeur de langues, j'ai eu l’opportunité de proposer des cours de langue commerciale et des programmes d'éducation financière aux ressortissants de pays tiers vivant dans l'UE. Cela a été une expérience vraiment enrichissante de constater l'impact transformateur de l'éducation. En dotant les individus de compétences linguistiques et de connaissances financières, nous améliorons non seulement leurs perspectives de carrière, mais favorisons également leur intégration dans la société européenne. Ensemble, nous brisons les barrières, rapprochons les cultures et créons un avenir meilleur pour tous », explique Daphné Samara qui a participé au projet pilote en Grèce.
Plus de 30 nationalités extérieures à l'UE ont participé ayant différents profils : étudiants, demandeurs d'emploi, réfugiés et employés, et plus de 40 % étaient des femmes.
Autres développements en cours
Partenaire de PLOUTOS, SquareDev, une PME belge spécialisée dans la recherche et les systèmes d'IA, a développé, une plateforme multilingue numérique visant à soutenir l'éducation financière des ressortissants de pays tiers vivant dans l’UE. Disponible en anglais, grec, bulgare, italien, croate, suédois et français, cette plateforme se compose de trois sections différentes : l'environnement de pratique d'entreprise virtuelle PLOUTOS (PBVE), la plateforme de microfinance PLOUTOS (MP) et la bibliothèque.
« Le PBVE vise à virtualiser la structure, le fonctionnement et les opérations d'une entreprise réelle (demandes de prêt, démarches fiscales, assurances des salariés, transactions postales, promotion de produits, import-export virtuel, transactions bancaires, etc.) dans un environnement d'apprentissage où les apprenants acquièrent des connaissances professionnelles et des compétences pratiques.
La Plateforme de Microfinance (MP) sera également un outil puissant car elle permettra aux bénéficiaires de rassembler tous les documents nécessaires pour demander un prêt de microcrédit », indique les représentants du réseau européen de la microfinance. Il sera utilisé à la fois comme environnement de formation et comme véritable outil que les institutions financières (banques et prestataires de microfinance) pourront adopter pour mieux servir leurs clients.
Enfin, pour les personnes déjà à un stade avancé dans leur projet d’entreprise, PLOUTOS offre l'opportunité de tester et de développer des compétences pratiques dans la gestion de leur propre entreprise (études de marché, planification commerciale, gestion financière) aux côtés de mentors et de pairs. « 5 à 10 ressortissants de pays tiers par pays pilote participeront et termineront le programme Business Practice, où ils pourront répondre aux questions qu'ils se posent en termes de démarrage ou d'amélioration de leur activité entrepreneuriale », indiquent les représentants du réseau européen de la microfinance.
Plus d’informations
Website: https://PLOUTOSproject.org/
Les ressortissants de pays tiers (RPT) sont confrontés à des défis spécifiques lorsqu'ils créent leur propre entreprise dans l'UE, qui vont au-delà de l'accès au (micro)financement. Des projets tels que PLOUTOS montrent qu’il existe un besoin substantiel d’adapter les services de développement commercial aux besoins spécifiques des RPT. Les programmes de subventions, mis en œuvre au niveau de l'UE (comme PLOUTOS) ou au niveau national en utilisant des ressources provenant de fonds de gestion partagée tels que le Fonds «Asile, migration et intégration» (AMIF) et/ou le Fonds social européen+ (FSE+), peuvent contribuer à fournir un soutien financier aux institutions de microfinance (IMF) par exemple et leurs permettre de fournir des services de développement commercial sous forme de formation, de coaching et de mentorat aux entrepreneurs provenant des pays tiers. Il est important que le soutien non financier aux RPT sous forme de services de développement commercial et d’accès au financement (par exemple via des microcrédits) soient liés l’un à l’autre et soient idéalement accessibles aux RPT à partir d’une seule source, par ex. grâce à une approche de « guichet unique ».